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Véracité, impacts éco-citoyens, présentation visuelle, labels et logos : les autres signes de greenwashing
Rédigé par Mathieu JAHNICH, publié le 24 octobre 2024
Le bilan « Publicité et environnement » ARPP-ADEME, publié début octobre et auquel je contribue en tant qu’expert nommé par l’ADEME, est un outil pédagogique intéressant puisque de nombreux cas d’utilisation trompeuse de l’argument environnemental y sont décrits.
Comme je le détaillais dans le précédent numéro de la newsletter Greenwashing news, les erreurs les plus fréquemment commises à l’occasion de cette étude sont l’utilisation d’un vocabulaire trompeur, le non-respect des règles de proportionnalité et le manque de clarté des messages.
Les principales autres non-conformités relevées sont relatives aux points suivants de la Recommandation Développement durable de l’ARPP : véracité, impacts éco-citoyens, présentation visuelle, signes, labels et logos. Voici quelques exemples concrets, tirés du Bilan ARPP-ADEME 2024.
Véracité
Selon le point 2 de la Recommandation DD, la publicité « ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable » et « les actions des annonceurs et les propriétés de leurs produits dans ce domaine doivent être significatives pour pouvoir être revendiquées ».
Plusieurs publicités durant la période d’analyse du bilan ne respectent pas ce point, en particulier parce que l’annonceur ne présente aucune explication justifiant l’allégation. Par exemple :
- Une marque d’ustensiles de cuisine qui se présente comme « responsable ».
- Une marque de vêtements outdoor qui affirme : « Nous développons des produits à intensité de carbone faible voire négative provenant de déchets biologiques ou de fibres naturelles recyclées ».
- Une marque d’emballages souples qui valorise sa « solution 4 en 1 pour des emballages responsables ».
- L’organisme d’attractivité et de développement économique d’une région allemande qui titre « We like to move it – jusqu’à zéro », là encore, sans aucune explication.
Impacts éco-citoyens
Le point 1 de la Recommandation DD relatif aux « Impacts éco-citoyens » stipule qu’une publicité « doit éviter de véhiculer un message contraire aux principes communément admis du développement durable. » Voici quelques exemples concrets tirés du Bilan ARPP-ADEME 2024 :
- Des véhicules qui circulent ou stationnent sur des espaces naturels. Dans la quasi-totalité des cas, ces publicités sont diffusées par des marques de moto, voiture ou camping-car ou des équipementiers. Dans un autre spot, c’est une marque de mode qui présente une voiture qui circule puis stationne dans un champ.
- Un publireportage pour une société de crédit à la consommation qui fait référence à des achats associant la notion de « déco-addicts » avec l’allégation « pour sans cesse renouveler leur intérieur » et représente donc une incitation à des modes de consommation excessifs.
Présentation visuelle
Selon le point 8 des règles déontologiques, « les éléments visuels ou sonores doivent être utilisés de manière proportionnée à l’argument écologique et aux éléments justificatifs qui l’appuient », « ils ne doivent pas pouvoir être perçus comme une garantie d’innocuité si cette dernière ne peut être justifiée » et, « sans exclure leur utilisation, l’emploi d’éléments naturels ou évoquant la nature ne doit pas induire en erreur sur les propriétés environnementales du produit ou des actions de l’annonceur. »
Plusieurs publicités diffusées pendant la période du bilan 2024 ne respectent pas ce point :
- Une marque d’emballages souples qui valorise sa « solution 4 en 1 pour des emballages responsables » avec un trèfle à 4 feuilles en gros plan sur le visuel.
- L’allégation « l’épargne responsable est donc une tendance forte et durable » associée au visuel d’un arbre, pour une assurance.
- Deux films pour une autre compagnie d’assurance dans lesquels les représentations d’éléments naturels ou évoquant la nature sont répétées, de façon disproportionnée : planète Terre, animaux, feuilles, arbres, éoliennes…
- Dans un film pour une marque de café, la séquence où une coccinelle est posée sur le doigt d’une femme puis sur une feuille laisse croire à une forme de protection de la biodiversité dans les plantations de caféiers.
Signes, labels et logos
Le point 6 de la Recommandation DD indique : « les signes ou symboles ne peuvent être utilisés que si leur origine est clairement indiquée et s’il n’existe aucun risque de confusion quant à leur signification. » Plusieurs cas ont été relevés dans le bilan :
- Une publicité presse pour promouvoir des ananas transportés en avion depuis le Kenya portant deux logos circulaires dans les tons de vert : « People, Planet, Produce » avec deux feuilles vertes et « Certifié Agriculture durable » avec un oiseau.
- Une banque en ligne faisant la promotion de certains écogestes dans la maison, en illustrant le post par des logos « maison », « arbre », « Terre » sur fond vert.
- Un post Facebook d’une chaîne de centres auto : logo d’une planète dans une main pour évoquer le développement durable.
- Un site de vente en ligne de produits d’équitation qui utilise plusieurs pictogrammes pour repérer différentes gammes de produits, susceptibles d’induire le public en erreur sur les caractéristiques précises des produits concernés : deux ou trois flèches circulaires, feuille verte.
- Un traiteur qui promeut sa « vaisselle écologique » et utilise un logo circulaire vert avec des feuilles.
Lors de la conception-rédaction des supports publicitaires et plus largement de tous vos contenus de communication, gardez en tête ces différents signes de greenwashing pour éviter de les reproduire.
Vous avez également intérêt à vous former et/ou à former vos équipes à l’évolution du cadre déontologique et réglementaire de lutte contre les allégations environnementales trompeuses. C’est justement l’objet de la Master Class Greenwashing que j’anime avec l’avocate Clémentine Baldon. Prochaine session : le mardi 26 novembre 2024 de 13h30 à 16h30.
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