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ADEME : posons-nous les bonnes questions avant d’acheter
Rédigé par Mathieu JAHNICH, publié le 19 décembre 2023
La dernière campagne de sensibilisation de l’ADEME « Posons-nous les bonnes questions avant d’acheter » montre qu’il est possible d’allier créativité et responsabilité, au profit de la diffusion du récit alternatif de la sobriété dans la consommation. La campagne introduit le concept de « dévendeur » : un conseiller qui ne pousse pas à la consommation mais préfère questionner sur les besoins réels. De surcroît, la réalisation des films a fait l’objet d’une démarche d’éco-socio-conception, validée par l’obtention de 3 étoiles au label Ecoprod. Nous avons eu l’occasion d’échanger avec Valérie Martin, cheffe du service mobilisation citoyenne et médias de l’ADEME.
Cette campagne démontre qu’il est possible de concevoir une campagne qui concilie créativité, efficacité et responsabilité. La tonalité positive des spots et l’utilisation d’un humour léger permet d’interpeller le public, d’aborder le sujet de fond (la surconsommation et ses impacts) sans le culpabiliser, sans être moralisateur. C’est également l’une des grandes qualités de cette campagne.
Une campagne grand public pour réfléchir avant d’acheter
L’ADEME a dévoilé le 14 novembre 2023 le premier volet de sa nouvelle campagne de sensibilisation intitulée « Posons-nous les bonnes questions avant d’acheter » qui cible les consommateurs. Les autres volets de la campagne, à destination des professionnels et des collectivités territoriales, seront diffusés en 2024.
Repenser ses besoins, réfléchir à ses actes d’achat sont les premiers pas vers des pratiques plus sobres au quotidien, qui à long terme contribuent à préserver les ressources et relever le défi climatique. Cette nouvelle campagne invite donc les Français à s’interroger avant de se lancer dans un achat :
- Ai-je vraiment besoin d’acheter ce nouveau polo alors que j’en ai déjà plusieurs semblables et en bon état ?
- Dois-je à tout prix racheter un nouveau lave-linge parce que le mien est en panne ?
- Est-ce qu’il est judicieux d’acheter cette ponceuse alors que je ne vais l’utiliser qu’une fois ?
- Faut-il forcément remplacer mon vieux smartphone HS par un modèle neuf dernier cri ?
- Est-ce que l’appareil que je compte acheter sera facile à réparer en cas de panne ?
Un nouveau personnage (le dévendeur) pour porter un nouveau récit
Sur le plan créatif, la campagne détourne de façon humoristique et décalée la figure commerciale du vendeur en mettant en scène le personnage du « dévendeur » : un conseiller atypique et pour le moins déroutant qui ne pousse pas à la consommation mais préfère questionner sur les besoins réels.
Le dévendeur n’hésite pas, en fonction des cas mais toujours dans l’intérêt du client (et celui de la planète), à le dissuader d’acheter un objet dont il n’aurait pas besoin, à l’orienter vers des alternatives à l’achat (emprunt, location, réparation) ou à lui conseiller un produit plus respectueux de l’environnement (de seconde main, porteur d’un bon indice de réparabilité…).
« Cette campagne a été conçue pour inviter les français à se poser les bonnes questions avant d’acheter, à reprendre le pouvoir en tant que citoyens. Il s’agit de prendre conscience que l’achat (neuf) n’est pas une fatalité. Quand on est sur le point d’acheter quelque chose, il est essentiel de se demander : en ai-je vraiment besoin ? L’acte d’achat ne doit plus être quelque chose d’automatique et d’impulsif, piloté par le désir d’acheter qui est exacerbé par les opérations commerciales, la publicité et le neuromarketing », nous explique Valérie Martin. « Ce personnage du dévendeur est un peu comme notre bonne conscience. On dit bien qu’il n’existe pas. Se poser la question du besoin réel, c’est retrouver la liberté de choisir, c’est reprendre la main sur sa consommation, même si le produit est à moins 70 %. C’est aussi respecter davantage le produit et les personnes qui l’ont fabriqué. L’objectif est bien sûr de soutenir une consommation responsable mais via de nouvelles modèles économiques créateurs de valeurs et d’emploi. Il s’agit d’un profond changement de récit : changer la manière dont on aborde les questions constitutives de la société, ici l’achat bonheur. »
Une campagne éco-socio-conçue
Cette campagne a fait l’objet d’une démarche d’éco-socio-conception, validée par l’obtention de 3 étoiles au label Ecoprod. Cette certification, délivrée par un organisme tiers indépendant, couvre l’ensemble des postes d’émission d’une campagne : déplacements, production et post-production, régie, communication, décors, habillage…
Pour ce film, l’ADEME et son agence ont actionné plusieurs leviers, notamment :
- Choix de comédies qui se déroulent en décors naturels
- Équipes locales et acteurs locaux pour réduire l’impact des tournages
- Casting prenant en compte la diversité
- Choix d’une maison de production engagée
- Sous-titrage des films
- Recrutement d’une cheffe de projet dédiée (écomanager de production audiovisuelle)
Valérie nous rappelle que l’ADEME est impliquée depuis de nombreuses années dans la structuration et le déploiement de la communication responsable, dans tous les secteurs et notamment sur les enjeux d’éco-production audiovisuelle, en particulier avec l’association Ecoprod. « Nous devions être cohérents dans notre démarche d’éco-responsabilité et viser l’exemplarité avec cette campagne. Nous avons couvert plus de 90% des exigences du référentiel, sans recourir à la compensation carbone. Cela démontre qu’il est possible de concevoir une campagne créative et efficace de façon la plus responsable possible. Nous espérons que cela inspirera d’autres acteurs. »
Pour en savoir plus sur la démarche d’éco-socio-conception du spot, consultez cet article, sur le site de la communication responsable de l’ADEME.
Et sur la question de l’usage de l’humour dans les communications sur le développement durable, je vous renvoie à l’étude de l’ADEME sur le sujet (2011 !) dont j’avais publié une synthèse.
Pour consulter les films de la campagne ADEME :
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