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Lutte contre le greenwashing : les apports de la directive européenne « transition verte »

Rédigé par Mathieu JAHNICH, publié le 02 octobre 2025

[Greenwashing News n°20 – 2 octobre 2025]

Alors que l’avenir de la directive européenne « Green claims » est incertain, la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) vient de souligner, dans une fiche pratique, les apports d’un autre texte capital dans la lutte contre le greenwashing.

Il s’agit de la directive 2024/825 « pour donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et grâce à une meilleure information ». Adopté le 28 février 2024, ce texte devra être transposé dans le droit français et des autres États membres au plus tard le 27 mars 2026.

Cette directive va pousser les entreprises à être plus rigoureuses dans la formulation de leurs allégations environnementales, en communication produit et corporate, et dans la préparation et la présentation des éléments de preuve.

Publiée le 30 septembre, la fiche pratique de la DGCCRF s’intitule « L’arsenal juridique de la lutte contre l’écoblanchiment bientôt complété : impacts de la directive européenne 2024/825 ». J’en présente ici quelques extraits.

Pour en savoir plus :

Modification des règles sur les pratiques commerciales déloyales et les droits des consommateurs

Ce texte modifie deux directives centrales pour la protection des intérêts économiques des consommateurs : la directive n°2005/29/CE sur les pratiques commerciales déloyales et la directive n°2011/83/UE sur les droits des consommateurs.

Ainsi, cette nouvelle directive « Transition verte » vise à renforcer les droits des consommateurs, à mieux protéger ces derniers face aux pratiques de « greenwashing » et à leur donner les moyens de faire des choix plus éclairés dans un marché où l’affichage écologique est devenu un argument de vente incontournable.

Pour les entreprises, cette directive nécessite une rigueur et une fiabilité accrues dans la communication environnementale mais elle permet aussi « de valoriser, dans un cadre de confiance renforcée, les efforts réels d’innovation et de durabilité, et de recourir avec mesure aux allégations et aux labels environnementaux, qui demeurent des démarches volontaires. »

Définition d’une allégation environnementale

La directive formalise la définition d’une allégation environnementale : « tout message ou toute déclaration non obligatoire en vertu du droit de l’Union ou du droit national, sous quelque forme que ce soit, notamment du texte, une image, une représentation graphique ou un symbole tels que un label, une marque, une dénomination sociale ou une dénomination de produit, dans le cadre d’une communication commerciale, et qui affirme ou suggère qu’un produit, une catégorie de produits, une marque ou un professionnel, a une incidence positive ou nulle sur l’environnement, est moins préjudiciable pour l’environnement que d’autres produits, catégories de produits, marques ou professionnels, ou a amélioré son incidence environnementale au fil du temps ».

Cette définition reconnait qu’une pratique commerciale peut reposer sur des images, des représentations graphiques, des labels, mais également le nom d’une marque. Cette définition inclut explicitement les allégations portant sur « le professionnel » (communication corporate) et non pas seulement sur les biens et services.

Définition d’un label de développement durable et d’un système certification

La directive interdit, en tant que pratique commerciale réputée déloyale en toute circonstance, les labels de développement durable privés qui ne sont pas fondés sur un système de certification.

Label de développement durable : « tout label de confiance volontaire, label de qualité ou équivalent, public ou privé, qui vise à distinguer et à promouvoir un produit, un procédé ou une entreprise pour ses caractéristiques environnementales ou sociales, ou les deux, et qui exclut tout label obligatoire requis en vertu du droit de l’Union ou du droit national ».

La directive définit ensuite les exigences procédurales sur lesquelles doivent être fondés ces labels en établissant un « système de certification », pour en garantir la fiabilité :

  • le caractère public et non discriminatoire du cahier des charges,
  • l’existence d’une procédure de retrait du label en cas de non-respect des critères,
  • la vérification par un organisme tiers indépendant.


Conséquence : les labels internes (établis directement par les entreprises pour leurs propres produits) comme tous les labels qui ne font pas appel à un tiers pour l’examen du respect du cahier des charges ne seront plus admis.

Remarque : les labels de développement durable mis en place par une autorités publique (nationale ou décentralisée) ne sont pas soumis à cet encadrement.

De nouvelles pratiques commerciales interdites

La directive complète la liste des pratiques commerciales « considérées comme déloyales en toutes circonstances » et donc interdites. On y trouve notamment (liste non exhaustive) :

  • Les allégations environnementales génériques, qui ne correspondent pas à une excellente performance environnementale reconnue en rapport avec l’allégation. Concrètement, une allégation telle que « meilleur pour l’environnement » ou « respectueux de l’environnement » pourrait être acceptable à condition que le produit bénéficie de l’Écolabel européen ou d’un autre label écologique conformes à la norme ISO 14024 (dits « de type 1 ») et que le professionnel indique les critères du label sur lesquels il s’appuie pour justifier que le produit présente une performance environnementale excellente.
  • Les labels de développement durable qui ne sont pas fondés sur un système de certification ou qui n’ont pas été mis en place par les autorités publiques.
  • Les allégations environnementales portant sur l’ensemble d’un produit ou de l’entreprise du professionnel, alors qu’elles ne concernent qu’un des aspects du produit ou une activité spécifique de l’entreprise.
  • Les allégations qui affirment, sur la base de la compensation des émissions de gaz à effet de serre, qu’un produit à un impact neutre, réduit ou positif sur l’environnement en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Concrètement, il ne sera plus possible pour une entreprise de faire un lien dans ses allégations entre un usage de crédits carbone et l’impact en termes de gaz à effet de serre de ses produits ou de ses services.
  • Le fait de présenter comme une caractéristique distinctive de l’offre du professionnel des exigences imposées par la loi pour tous les produits de la catégorie concernée.

Jusqu’à présent, ces pratiques pouvaient être sanctionnées au cas par cas par les juridictions. Elles deviennent désormais illicites au niveau de l’Union. Il ne sera plus nécessaire de démontrer l’altération du comportement du consommateur. Ces pratiques seront donc plus facilement sanctionnables.

De nouvelles pratiques commerciales trompeuses au cas par cas

La directive ajoute à la liste des pratiques commerciales trompeuses deux nouvelles pratiques :

  • les allégations environnementales relatives aux performances environnementales futures qui ne sont pas étayées par des engagements et des objectifs clairs, objectifs, accessibles au public, vérifiables et présentés dans un plan de mise en œuvre détaillé et réaliste.
  • les publicités d’avantages pour les consommateurs qui ne sont pas pertinents et qui ne sont pas directement liés à une caractéristique du produit ou de l’entreprise.

En outre, elle intègre aux caractéristiques essentielles du produit sur lesquelles un professionnel ne doit pas induire un consommateur en erreur les « caractéristiques environnementales et sociales », la « durabilité », la « réparabilité » et la « recyclabilité » du produit.

Par ailleurs, les professionnels devront dorénavant, lorsqu’ils fournissent un service qui compare des produits et qui informe le consommateur de caractéristiques environnementales, sociales ou d’aspects liés à la circularité (tels que la durabilité, la réparabilité ou la recyclabilité) associés à des produits ou aux fournisseurs de ces produits, mettre à disposition des consommateurs les informations sur la méthode de comparaison, sur les produits faisant l’objet de la comparaison et sur les fournisseurs de ces produits, ainsi que sur les mesures mises en place pour tenir ces informations à jour.

Finalement, cette directive européenne « pour donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte » vient renforcer le droit français dans la lutte contre le greenwashing et établir des règles communes dans tous les États membres. C’est une avancée significative. Nous verrons si les négociations sur la directive « Green claims » reprennent. En attendant, les entreprises ont déjà beaucoup à faire pour se mettre en conformité avec ces nouvelles règles.

Source de l’image : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/api/files/attachment/872173/Factsheet%20Empowering%20Consumers.pdf

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